LA PASSION DES FLEURS
Donnez des crayons de couleurs à un enfant et spontanément, il vous dessinera une fleur !
Quelle fleur ? Une belle fleur, inconnue du botaniste, avec un coeur énorme d’ou jaillissent des rangs serrés de pétales éclaboussés d’un rouge vif ou d’un violine baveux , le tout porté par une modeste tige dont on voit bien qu’elle ne sert à rien, si ce n’est à permettre leur cueillette par une petite main ravageuse....
Les fleurs, je les ai voulues ainsi, aux formes simples, aux couleurs de l’enfance. Pas de hiérarchie dans mes amours : Le coquelicot qui déplie son frêle jupon de soie ponceau m’émeut autant que le bouton de la rose chou qui enclos sous ses sépales, plus de cent pétales de satin glacé.
J’aime pareillement la frivole capucine fluorescente, capuchon d’une fée clochette fantasque qui s’acoquine avec le soucis des champs, un peu trop gras, un peu trop orange, mais si bon compagnon.
J’ai souhaité retrouver les odeurs et les parfums appris dès l’enfance, quand les fleurs se laissent respirer à hauteur du nez : la rose aux jupes de soie champagne d’où s’échappe ce parfum de thé et de vieilles dentelles, la grosse pivoine rouge, trop maquillée qui sent la poudre de riz, le lis et ses cornettes blanches à odeur de sainteté, la minuscule violette aux subtiles effluves...
Parfumées, si odorantes, que je noie leur intime senteur dans l’ huile ou dans l’alcool pour mieux la capturer.
Belles, si belles que parfois je les mange toutes crues, d’autres fois, je déshydrate leurs fleurs pour les ressusciter plus tard, dans l’eau de mes tisanes.
Colorées, si vives et si gaies que je sèche leurs corolles pour égayer mon hiver d’un pot pourri éclatant .
Simples, si faciles que je laisse leurs fleurs grainer et ensemencer dans une joyeuse pagaille, les joints de vieux mortier de la terrasse.
Toutes ces fleurs et bien d’autres se côtoient dans mon jardin, regroupées par affinité, voisinant par hasard, renaissant chaque printemps, jamais tout à fait à la même place. Il faut les fréquenter depuis longtemps pour reconnaître à coup sûr, parmi les herbes folles ou les graviers de l’allée, leur minuscule progéniture issue des innombrables graines dispersées au hasard des vents d’automne ou perdues par des bataillons de fourmis convoyeuses de graines.
Laissez vous séduire par le jardin de fleurs, laissez vous emporter par ce tapis magique des mille et une nuits, que la jardinière a brodé à points comptés de mille repiquages.
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